Interview avec Leila AD suite à la sortie de son 1er EP, ADN !

Leila AD, ADN, 2021

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Je vous partage aujourd’hui un échange avec la chanteuse belge Leila AD, suite à la sortie de son EP ADN, le 19 novembre 2021. La jeune femme dévoile 8 titres délicats et impactants dans lesquels elle se livre. Avant de se lancer dans la musique, Leila était influenceuse, statut dont elle voudrait se distancier, maintenant qu’elle entame une carrière dans un nouveau domaine. Elle nous parle de son arrivée dans le milieu musical, et des similitudes que l’influence peut avoir avec le métier de chanteuse en ce moment.

Tu es belge. L’influence et la musique sont deux industries très florissantes en Belgique. Pourquoi avoir choisi la France pour ta carrière ?

« J’ai commencé sur les réseaux sociaux vers 2017 en tant qu’influenceuse, pas en tant que chanteuse. A l’époque, en Belgique, ce n’était pas aussi développé que maintenant pour l’influence. A chaque fois qu’il y avait une soirée, un événement pour une marque, je devais aller à Paris et en plus du trajet, ça me coutait cher. J’ai fini par m’y installer, parce que j’y allais très souvent, et que je voulais changer de vie. Pour ce qui est de la musique, quand j’ai commencé dans ce milieu, ça faisait déjà presque trois ans que j’étais parisienne. L’opportunité s’est présentée là-bas, si ça s’était fait en Belgique plus tôt, je l’aurais fait en Belgique, (on a beaucoup de très bons artistes qui sont connus mondialement), mais ça n’a pas été le cas. En plus, quand j’étais encore en Belgique, j’avais une grande partie de ma communauté qui était française. Ca fait une raison de plus. »

L’influence et la musique sont deux milieux qui ont beaucoup de points communs. Quelle différence fais-tu entre les deux ?

« Ce sont deux milieux artistiques différents mais ils se rejoignent quand même. Dans tous les cas, même aujourd’hui en tant qu’artiste – chanteuse – j’ai toujours ce petit côté influence derrière. Ces habitudes de parler avec ma communauté, sur Snapchat ou Instagram, en story etc, et c’est davantage passionnant de le faire en musique que dans une vidéo où tu ne fais que parler. »

Comment ta communauté a réagit quand tu es devenue chanteuse ?

« Etant donné qu’il y a beaucoup d’influenceurs, de youtubeurs qui se sont mis à faire de la musique, certains de mes abonnés, surtout les premiers qui me suivaient d’avant, avaient un peu de mal, il se disaient « Une de plus ! ». Mais le temps de leur montrer que c’est par passion, que ça ne date pas d’hier, ça allait. »

Si la musique t’a toujours intéressé, pourquoi te lancer maintenant ?

« Il m’a fallu du temps. On m’avait déjà parlé de musique dans mes débuts, un an après que j’avais commencé à me faire connaître sur Youtube. Des labels m’avaient contacté, mais je n’étais pas prête. En tout cas, je n’avais pas encore réalisé que ça m’intéressait à ce point. Plus tard, juste après le confinement j’ai essayé, parce que l’opportunité s’est présentée. Je voulais tester, j’ai kiffé, donc je me suis dis « Go ! ». J’ai mis en privé toutes mes vidéos Youtube, je ne les ai pas supprimé parce que ça me tenait à cœur de les garder. J’ai décidé de garder la même chaine Youtube pour mettre ma musique parce que ça reste moi. »

Comment se constitue ta communauté maintenant que tu n’es plus dans le même domaine ?

« Aujourd’hui, ça se mélange. Après j’ai de nouveaux arrivants, tous les jours il y a de nouvelles personnes. Evidemment il y a une différence entre celles qui arrivent maintenant, où on sait que c’est uniquement pour la musique parce que je ne fais plus que ça, et celles qui sont là depuis mes débuts sur Youtube, parce que je reconnais leurs identifiants du temps où je pouvais compter mes abonnés sur les doigts d’une main. Celles qui ne m’ont pas lâché depuis. Donc c’est un mélange des deux. »

De quoi tu te sers dans la musique, que tu as appris avec l’influence ?

« Quand je fais des interviews vidéos, on est souvent étonnés que je sois à l’aise avec la caméra, pareil pour les clips. Les gens n’ont pas conscience que ça fait trois ans que je parle seule à une caméra chez moi. Je me suis habituée à m’exposer, à savoir que des gens vont m’écouter, à faire la part des choses entre ce que je peux dire et ce que je ne peux pas, qu’il y a certaines façons de penser que je peux exprimer d’autres sur lesquelles je me restreins, parce que je suis suivie par des enfants, des adultes, j’ai déjà ce recul de faire attention à mon image, à ce que je dégage, de ne pas influencer en mal, de partager de bonnes ondes, et je pense que dans la musique, surtout quand tu es une femme et que tu chantes, que tu ne rappes pas, c’est important. Ca peut vite déraper. »

Comment vois-tu ta carrière sur le long terme ? Comptes-tu un jour revenir à l’influence ?

« Le fait d’intégrer le monde de la musique m’as appris que j’aimais plus ça que l’influence. Déjà avant la musique j’étais un peu perdue sur les réseaux sociaux. Je n’avais plus d’inspiration, d’envies, plus de volonté de filmer mes vidéos, au point d’abandonner un peu ma communauté. Là je leur montre que je reviens avec autre chose, certes, mais autre chose où je me donne à fond. Je peux m’enfermer au studio et rentrer chez moi à cinq heure du matin et être décalée le lendemain, mais kiffer vraiment ce que je fais. Donc non, pas de projet de revenir dans l’influence. Pas du tout, j’essaye même de me détacher de cette image d’influenceuse, mot que je n’aime pas en plus. Dans la cosmétique je ne vois pas ce que j’influence, ce n’est pas comme si j’étais dans le féminisme. A la limite j’influence les autres à s’habiller ou a se maquiller comme moi. Maintenant être influenceur c’est devenu commercial, on influence les gens à acheter, et je ne veux plus de cette étiquette. C’est pour ça que je fais tout pour me détacher de cette image. Certes je poste moins et exclusivement sur la musique, j’ai perdu presque 40 000 abonnés sur les réseaux, mais ce n’est pas grave. C’est 40 000 personnes qui ne veulent pas me suivre donc je n’ai pas besoin qu’elles soient là. C’est du tri et je les remercie de l’avoir fait d’eux-mêmes, comme ça je n’ai pas à m’en occuper. »

La musique et l’influence sont en boom aujourd’hui. Comment vis-tu le fait de faire partie de deux milieux qui se développent en même temps que toi ?

« C’est cool. J’ai de la chance parce que j’arrive au meilleur moment. Si j’avais fait influenceuse pendant un an, et qu’après j’avais enchainé sur de la musique, et que ça n’aurait pas été le moment où ça faisait du bruit, peut-être que j’aurais baissé les bras, perdu la volonté. Je peux tenir bon ou lâcher, ça dépend mais si je travaille, travaille, travaille et qu’il n’y a rien, alors ce n’est pas la peine. Donc c’est une bonne chose et ça me permet de voir les retombées. »

Est-ce que ton entrée dans l’industrie musicale a été difficile ?

« Ca a été compliqué au début. Surtout la première année quand j’ai commencé à sortir mes premiers singles. Parce qu’il y avait des gens qui se moquaient de moi, j’avais des amis dans le milieu de la musique qui ont complètement changé à cause de ma reconversion, oui ça a été difficile au début, mais une fois que je me suis rappelé que j’avais ma place et que je savais chanter, je m’en fichait des critiques. J’ai mon équipe, je suis très restreinte sur ça et je ne me mélange pas, c’était compliqué mais là ça va mieux. »

A travers tes morceaux tu dépeins une jeune fille fragilisée et mise à l’épreuve par la vie. Aujourd’hui tu es beaucoup plus confiante et sereine. Qu’est-ce qui a permis ce changement ?

« C’est justement ce que j’ai vécu qui a fait de moi ce que je suis aujourd’hui. Sans ces épreuves là, qui étaient très très dures, sans vouloir me victimiser, d’autres que j’ai gardé privées étaient encore pires, ça a fait que j’ai gardé une sorte de carapace. Il y a eu du bon comme du mauvais, c’est peut-être ça aussi qui a fait que j’ai du caractère et cette rage de vivre, dans la musique ou dans la vie de tous les jours. Ca m’a forgé. »

C’est ainsi que cette interview se termine. Si tu veux en apprendre davantage sur Leila et sa vie retrouve mon article sur le sujet en cliquant ici. Et si tu veux en savoir plus sur son EP ADN, clique .

Leila AD, ADN, 2021