Anne Sylvestre : ses plus belles chansons féministes

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Anne Sylvestre ; impossible de lire ce nom sans penser à ses contes et autres Fabulettes (titre de plusieurs albums pour enfants). Mais peu savent qu’elle ne s’adressait pas seulement aux petits. Cette grande poétesse, qui nous a quittés à l’âge de 86 ans le 30 novembre 2020, était aussi une parolière engagée. Son art ? Elle l’a mis au service de causes importantes. Souvent en avance sur son temps, elle écrit des textes sur l’écologie, le mariage gay, l’avortement, le viol, la violence faite aux femmes, la sororité…

Femme dans un monde d’hommes, elle était contemporaine de George Brassens, Léo Ferré, Jacques Brel ou encore Jean Ferrat. Anne Sylvestre a réussi à se faire une place parmi les plus grands, grâce à ses écrits engagés et drôles. Elles savaient manier la plume et interpréter ses textes pour nous faire rire, mais aussi pour que l’on ressente l’indignation, la tristesse ou la colère, selon les thèmes choisis. En hommage à cette artiste extraordinaire, nous vous présentons une liste non exhaustive de ses plus belles chansons féministes.

Une sorcière comme les autres — 1975

Texte émouvant et subtil, en l’écoutant on prend conscience du poids si lourd qu’est le regard des hommes sur les femmes (aujourd’hui on parle du male gaze). Depuis des siècles, elles sont enfermées dans des rôles : tantôt mères ou filles, putes ou saintes, servantes ou princesses… Anne Sylvestre s’adresse ainsi aux hommes et leur somme d’entendre et de comprendre la domination masculine qu’ils font subir au quotidien. « Vous m’avez aimée servante ; M’avez voulue ignorante ; Forte vous me combattiez ; Faible vous me méprisiez… »

Non tu n’as pas de nom — 1974

Anne Sylvestre s’adresse à l’enfant qui aurait pu être, si elle lui avait donné naissance. Au fur et à mesure de la chanson, sa voix devient de plus en plus triste, nous nous mettons à la place de cette non-mère et ressentons ainsi sa peine. En avance sur son temps, cette chanson est sortie un an avant que soit légalisé l’avortement en France. « Déjà tu me mobilises ; Je sens que je m’amenuise ; Et d’instinct je te résiste ; Depuis si longtemps j’existe ; Depuis si longtemps je t’aime ; Mais je te veux sans problème ; Aujourd’hui je te refuse ; Qui sont-ils ceux qui m’accusent… »

Douce maison — 1978

Pas juste une chanson, mais une manifestation, un cri du cœur. Anne raconte un viol collectif, utilisant avec finesse l’image d’une maison saccagée. Ce texte ne s’adresse pas qu’aux agresseurs, mais aussi aux personnes qui se permettent de juger les victimes, les croyant responsables de leur sort. Sa voix se faisant pleine et en colère au fur et à mesure de la chanson, vous serez touché par son interprétation si juste. « La maison, depuis ce crime, n’a plus d’âme ni de nom ; Mais elle n’est pas victime, c’est de sa faute, dit-on ; Il paraît qu’elle a fait preuve d’un peu de coquetterie ; Avec sa toiture neuve et son jardin bien fleuri… »

Juste une femme — 2013

Chanson écrite suite à l’affaire DSK. Anne Sylvestre s’insurge de ce qu’elle entend dans les médias, ces journalistes et témoins qui minimisent cette agression. À presque 80 ans, sa plume est toujours acérée et en quelques lignes, fait mouche. « Petit monsieur, petit costard ; Petite bedaine ; Petite sal’té dans le regard ; (…) ; Il y peut rien si ça l’excite ; Et qu’est-ce qu’elle a cette hypocrite ? ; Elle devrait se sentir flattée ; Qu’on s’intéresse à sa beauté… »