Portrait musical n°2, Jeanne, de la chaîne Youtube « Jeanne Lyra » !

Jeanne Lyra, 2022, interview, portrait musical

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Introduction

On écoute et on consomme (presque) tous la musique … Mais personne ne le fait pareil ! Bienvenue dans la série d’interviews des “Portraits musicaux”, celle qui décrypte, compare et raconte notre usage de la musique au quotidien, et plus précisément, celui des créateurs de contenu. J’invite ce corps de métier à se livrer sur ce qui rythme ses journées, quels que soient le domaine et la plateforme des intéressés. Pourquoi eux ? Parce qu’ils représentent mieux que personne notre époque et ses enjeux, entre partage, exposition sur les réseaux et incarnation d’une génération spécifique.

Un critère : la musique ne doit pas être plus qu’une passion.

Une requête : l’invité doit choisir un artiste et trois clips qui l’ont marqué au cours de sa vie.

Découvrez leurs habitudes d’écoute, leur parcours musical et rencontrez ces faiseurs d’images à travers ces entretiens sous un angle neuf et original !

Présentation

Jeanne aime intensément la vie. Elle y plonge joyeusement et rageusement à la fois, sans se laisser envahir par les remous que ça peut provoquer. Le jour du rendez-vous, elle m’apparait comme une jeune femme paisible et pleine d’intérêt pour ce et ceux qui l’entourent. Elle a 26 ans, est parisienne, vient de finir un master de cinéma, scénario, réalisation, production, et termine tout juste “Les matins, il y a le silence” son troisième court métrage.

A côté de tout ça, elle a une activité sur les réseaux depuis plus de six ans sur Youtube et Instagram. Elle regroupe près de 26 000 personnes. Elle y partage des playlists vidéos dont les “bilans culture”, “les spots de Jeannot”, “les cops de Jeannot”, “les expériences vlogs”, et d’autres … Sa chaîne est un bric à brac culturel, introspectif et finalement terriblement organisé, d’une des versions d’elle-même, Jeanne Lyra, qui est son pseudo sur internet. Son contenu pousse à la réflexion sur des sujets de société ou liés à la culture, sans pour autant rentrer dans le piège de l’intello barbante. Non seulement c’est fait en douceur mais c’est aussi plein de pertinence et de profondeur.

 

Entrée en matière

Métier(s) : scénariste, réalisatrice, vidéaste, et plus globalement artiste.

“Je ne suis pas créatrice de contenu ou influenceuse. je n’ai pas de concept, de ligne éditoriale, d’habitudes, de calendrier … En gros mon objet marketing, mon chemin c’est Jeanne Lyra. Ce nom c’est ce que je suis sur internet. C’est ma sensibilité, mon avis sur milles sujets.”

“C’est à partir du moment ou ma chaîne est arrivée dans ma sphère privée, c’est-à-dire qu’on m’a reconnu, ou que des amis proches m’ont vu dans des positions de vulnérabilité via internet et m’en ont parlé dans la vraie vie, quand j’ai compris que les deux étaient liés, Je n’en avais jamais parlé à ma famille, et quand elle est tombée dessus, je me suis dit “ok, c’est aussi en libre accès pour ma famille. Ce qui n’est pas un problème, mais il faut que j’en sois consciente quand je le fais, ce qui n’était pas le cas à un moment. Une fois consciente de ça, c’est devenu quelque chose que j’ai beaucoup plus contrôlé. Parce que je me suis rendue compte des limites que ça avait et du danger que ça représentait. Ce que je ne réalisais pas du tout quand j’avais 20 ans. Maintenant je le réalise à fond. Il y avait aussi toute la démarche narcissique, que je ne comprenais pas du tout à l’époque, et que je comprends beaucoup mieux maintenant.”

 

Entretien

Est-ce que tu vois un lien entre faire des vidéos Youtube et faire du cinéma ? 

“A fond ! Dans deux choses : affirmer que mon point de vue est assez fort pour être partagé, soit via des vidéos Youtube, soit au cinéma en racontant mon histoire, de mon point de vue et en motivant mon équipe de techniciens à me suivre pour le faire et un public à le regarder, ça c’est plus sur la partie ego et personnalité dans mon rapport au travail et de l’autre côté oui forcément parce que dans les deux (Youtube et cinéma) passent ma sensibilité. Alors c’est très différent, les deux sont dissociés et c’est pour ça que je ne signe pas de la même manière. Youtube je signe avec mon nom (Jeanne) Lyra et mes films je les signe avec mon vrai nom de famille. L’un je veux que ce soit mon métier et l’autre que ce soit un terrain de jeux et un moyen pour mieux faire mon métier, mais ce n’est pas une fin en soi, ça fait partie du chemin. La fin en soi c’est de faire des films.”

Le plaisir que tu prends à faire des vidéos, il est constant ? 

“Non. Parce que quand l’argent est rentré en jeu, que j’ai commencé à gagner du fric, d’autres questions se sont posées, d’un modèle économique, d’à quel point je pouvais en faire un business ou pas, qu’est-ce que ça voulait dire de moi … Parce que je me suis mise à vendre mon concept qui n’est autre que moi, c’était très bizarre, du coup j’ai eu une période de flottement, d’apprentissage de tout ça, de qu’est-ce que je montre, pourquoi je le vends, est-ce que je suis honnête avec moi même et avec le public quand je le fais, pourquoi je le fais, c’est un sale jeu l’influence !”

Jeanne, aime Youtube et son côté créatif, moins son aspect commercial.

“Et puis aussi il y a cette question fondamentale de l’existence à laquelle je ne peux pas répondre, qui est : qui suis-je ? On se pose cette question de manières différentes à différents moments de notre vie. A un moment quand tu es une personnalité publique et qu’on te reconnait tout le temps, ton rapport est différent à tout, vu qu’on te reconnait et que tu n’es pas à égal par rapport aux autres. Quand c’est devenu régulier et contre mon gré habituel, alors que c’était une habitude dont je n’avais pas particulièrement envie, ça remet les compteurs à d’autres endroits. Il y a tellement de questions qui découlent de ça, pourquoi je suis appréciée ? Elle est où ma sincérité ? Est-ce que je suis honnête ou pas ? Qu’est-ce que je dois donner ou pas ? Je suis disponible ou pas ?”

Toutes ces questions qui te viennent par rapport au fait de t’exposer à un public, cette expérience de la notoriété à ton échelle, te fait-elle considérer différemment les acteurs, les artistes, les musiciens et tous ceux qui ont un statut de personnalité publique ? 

“Oui. J’ai un tout petit goût de ce que ça fait la popularité. Psychologiquement, à l’égo, dans le quotidien, par rapport à l’anxiété … C’est absolument impossible de ne pas changer face à la popularité. Le fait que tu n’es plus dans un rapport d’égalité change tout à ton existence, et ce n’est pas grave. On donne de l’importance à ton existence, basé sur des choses subjectives : ton talent, ton travail, et c’est difficile. Il faut le vouloir ou être armé. Il faut bien travailler sur sa psychologie personnelle parce que ça peut faire vriller. Un moment moi, qui essaye justement de me connaitre au maximum, de me poser des questions, ça m’a quand même un peu décalé, ça ne me met pas à la bonne place. Je veux avoir conscience de qu’est-ce que ça vient me faire.”  

Toi cette exposition, c’est quelque chose dont tu ne voulais pas ? 

“Si mais je voulais en avoir conscience. Avoir conscience de qu’est-ce que ça me fait.” 

Et si un jour tu réussis dans le cinéma, ça va  forcément amplifier cette notoriété. 

“Oui mais je me sentirais mieux à ce que ce soit pour mon travail, c’est-à-dire mes films, et pas ma personne. Sur Youtube j’ai partagé ce que j’étais. On voit mon corps, mon appart, mes fringues, ma manière de parler, mes valeurs, mes avis, mes amis, beaucoup moins qu’avant parce que j’ai fait un tri, mais encore une fois, c’est moi. Et c’est difficile de se dire que ce que l’on aime, c’est moi. Alors qu’on ne me connaît pas. C’est une idée de moi. Pour les films, pour qu’ils soient vus, et que le spectateur rencontre le film, c’est à un endroit, et si cet endroit est jugé bon, valable, juste, de qualité, je suis la plus heureuse au monde parce que c’est mon travail. Et pas que ! Il y une équipe derrière qui à suivi, que c’est de beaucoup plus longue haleine, que c’est quelque chose qui est pensé … Qui a beaucoup plus d’envergure que Youtube.”

Mais autant sur Youtube qu’Instagram c’est toi qui dirige et il y a ton nom à la fin. 

“Oui mais je fais vraiment une très grande distinction, parce que ce que je vends ce n’est pas moi. Je ne dis pas “Regardez-moi comme je suis forte !” C’est oui je suis forte parce que j’ai peut-être trouvé de bons comédiens, une bonne équipe et que j’ai de bonnes intentions, mais c’est la magie de tous ces éléments et parce que j’étais accompagnée de toute cette équipe qu’on a créé un truc. Quand tu fais des films tu n’es jamais tout seul. C’est trop chiant qu’il n’y ai que le réalisateur qui signe, mais tu es dans une synergie, et je suis fière de moi parce que j’ai créé la synergie qui a permi d’avoir un objet et qu’il vous rencontre. Alors que me vendre seule et dire je suis Jeanne Lyra et c’est stylé bah non. Je n’ai pas assez de légitimité. Je suis en mode je ne fais quand même que  des vidéos derrière mon ordinateur et les seules choses qui m’ont permis de faire ça sont mon éducation, ma personnalité, mais je l’ai pas vraiment choisi. Bien sûr qu’un jour j’ai choisi de me mettre sur internet. Bien sûr que ça me fait trop plaisir  de partager ces choses là et que personne ne me force et que j’y trouve du plaisir. Mais c’est beaucoup plus un jeu.” 

“Ce qui est hallucinant c’est à quel point je me fais reconnaître en n’ayant qu’une micro communauté.”

Dès qu’il y a un écran qui nous sépare d’une personne, qu’il y a cette barrière de la popularité, ça crée un rapport spécifique et pas toujours sain entre le public et la personnalité qu’il regarde, suit, soutient. 

“Oui, il faut savoir où mettre une limite. Pour mieux encadrer ça. J’ai ouvert mon Patreon, qui est une plateforme qui permet une visibilité plus limitée, ciblée, sécurisante, où ce ne sont que des gens qui payent pour te suivre. Je suis beaucoup plus safe là-bas à raconter des trucs plus intimes”

 

Les clips 

Est ce que faire la sélection était difficile ? Comment as-tu procédé ?

“Je voulais te choisir des clips qui comptent pour moi et qui sont constituants de celle que je suis. Qui font partie de mon histoire. Il faut savoir que j’ai un très gros problème de mémoire. J’oublie beaucoup, d’où probablement ma démarche de filmer pour Youtube et pour le cinéma, pour avoir des marqueurs forts sur mon passé, puisque j’oublie tout. Il me faut quelque chose pour me souvenir. Un texte, une chanson, une photo, un objet … Ce que j’ai choisi dans cette sélection musicale, ça me rappelle des évènements, des stades de vie, des endroits. Je n’ai pas eu à beaucoup chercher. Tatu, et The Blaze c’était évident, mais je n’arrivais pas à trouver le troisième parce que je n’arrivais pas à trouver où est-ce que j’avais été claquée par l’image et le son. D’autant plus de mon point de vue de cinéaste.”

“Par exemple, Virile de The Blaze c’est un des clips qui a confirmé mon envie de faire ce métier. Parce qu’au début je ne voulais pas faire de court-métrage, je voulais faire des clips. A une époque je bouffais des clips à longueur de journée puisque je voulais en réaliser, et le seul qui m’est resté, c’est Virile de The Blaze”

Le clip le plus connu de The Blaze, celui que le plus de gens ont vu, et donc qui aurait pu être ton choix aussi, c’est Territory. Pourquoi as-tu plutôt choisi Virile ?

“Pour le souvenir. Le jour où je l’ai découvert j’ai tout de suite trouvé que c’est un chef-d’œuvre. J’ai ressenti une émotion immense, le moment où je l’ai découvert, cet endroit là de ma vie a été marqué, il y avait la vie d’avant, et la vie d’après. Je n’étais pas bien, mon ex venait de me quitter et après ce clip j’ai pris la décision de faire du cinéma mon métier. Ce clip est beau dans son économie. Dans sa sobriété. Il ne se passe rien. Tu as une pièce, un joint, deux hommes, une caméra, et c’est excessivement fort. J’aime que ce soit enfermé, les couleurs, tout ce qu’il se passe, et à quel point ce genre d’œuvre influence mes films. ”

Pour toi c’est la musique qui apporte à l’image ou l’inverse ?

“Je pense que ce qui fait la force d’une musique c’est quand elle est pensée avec un récit. C’est pour ça que dans tous les clips que j’ai choisi, il y a une histoire qui commence et qui finit. La musique ça sert à accentuer, accompagner, englober une scène. Il y a mille films, si tu enlèves la musique la saveur n’est pas la même et la musique donne tout le relief à l’image, sur les films de Céline Sciamma par exemple ou sur “Les Olympiades”, le dernier film de Jacques Audiard. Pour moi c’est indissociable.”

“Ça peut aller dans les deux sens. En tant que réalisatrice de clips, c’est la musique qui m’aurait donné les images, en tant que réalisatrice de film, j’aurais fait les images que j’aurais donné à un compositeur ou une compositrice et qui aurait fait sa musique par rapport aux images, même si elle ou il aurait déjà composé des prémices par rapport au scénario. Ça dépend. »

L’aspect visuel de Virile de The Blaze est très spontané, brut, comme si une simple caméra filmait des images à la dérobée. On pourrait penser que c’est la réalité qui est reportée alors que c’est complètement construit et pensé, mis en scène. 

“C’est ça que j’adore avec le cinéma. Faire croire à quelqu’un que c’était facile à tourner. Que c’était évident. Arriver à faire croire que tu es la seule personne à assister à, par exemple, une dispute de couple, que ça a été pris en temps réel, que c’est vrai … Alors que non ! La prise on l’a fait pendant une heure, il y a soixante personnes dans la pièce, il faisait jour alors on a mis des rideaux sur les murs, et ça c’est trop bien.”

“J’ai choisi ce clip parce qu’il y a Ophélie Bau, une véritable muse et pour la référence à Kechiche, et que Disiz est un artiste que j’ai beaucoup écouté dernièrement. Je fais des obsessions. J’écoute un morceau quarante huit milliard de fois pendant un mois et après je passe à autre chose.”

“ C’est un souvenir. Mon premier souvenir du clip et de la musique clippée, c’est quand j’étais petite, à six ou sept ans, quand je regardais les tops des clips à la télévision. C’était aussi une obsession aussi. Je passais des heures à me manger les tops, à regarder des tonnes de clips et un de ceux qui m’est resté c’est celui là. Il m’avait choqué parce qu’il y avait deux filles qui s’embrassaient et pendant longtemps je n’ai pas capté. Le fait d’avoir vu beaucoup cette image petite, puisque le clip passait souvent, ça m’a montré que c’était possible, et je n’avais pas à me poser la question de est-ce que c’est possible pour moi ou pour les autres. Après j’ai eu de la chance dans mon apprentissage de la sexualité, et dans comment j’étais entourée, mais je n’ai jamais parlé d’homosexualité avec mes parents je crois. J’ai eu des copines lesbiennes très jeune, ce qui fait que l’homosexualité pour moi n’a jamais été une question, ce qui m’a autorisé à l’être. Le sexe c’est important, l’amour et le désir aussi, et la chance que j’ai dans la vie c’est que j’aime les deux sexes. Ca veut dire deux fois plus d’expériences. Ce que j’ai appris en étant avec des filles et en étant avec des garçons c’est une chance. Même si je ne pourrais pas le déterminer, j’ai ressenti du désir en voyant ce clip là. Et comme le désir est le mot d’ordre de ma vie, ça joue beaucoup.”

“Ce clip est un acte libre, qui ne se pose pas la question de “ Est-ce qu’on a le droit ? ”. C’est directement “ On le fait ! ”. Et ça c’est important. On le fait et tant pis du qu’en dira t-on, de la morale, c’est très ambitieux et c’est bien. Ne pas se donner de limites. Des meufs en 2008 qui font un clip comme ça, c’est trop bien ! C’est presque révolutionnaire. Aujourd’hui on manque cruellement de ça.”

Tu regardes le clip directement ou tu écoutes d’abord sans l’image ?

« Ça dépend. Généralement j’écoute ou regarde ce qui sort en premier.”

Parfois le clip change l’idée qu’on s’était faite de la chanson, rien qu’avec le son et vice versa. Qu’en est-il pour toi ?

“Eh bien pour le coup, heureusement que j’ai d’abord énormément écouté Libre d’Angèle sans voir le clip parce qu’il m’a dégoutée.”

C’est ainsi qu’elle classerait ces quatre éléments : émotion, texte, visuel, mélodie.

“Moi c’est complètement la mélodie qui m’accroche. Par exemple, Libre d’Angèle, je trouve les paroles très bêtes,  mais le refrain me convainc à chaque fois. Djadja & Dinaz c’est pareil.”

 

Pensées finales

“Dans mes écouteurs, je préfère ressentir les émotions qui me viennent de façon personnelle et individuelle plutôt que dans un concert de façon partagée et collective.”

Écouter de la musique la calme ou l’excite. Ça l’accompagne, parfois aussi ça l’isole, ça lui permet de ne plus penser, ça la coupe du bruit ambiant. Triste elle n’écoute pas de musique.

Son mot sur Yelle, qu’elle choisit comme faisant partie des rares artistes qui l’ont marqué et qui la marquent.

“Je la trouve très cool, je l’ai choisi parce que c’est une des seules artistes que je suis depuis des années et que j’ai pu caler dans plusieurs périodes de ma vie en fonction de ses albums, avec laquelle j’ai plus de souvenirs, dont j’ai suivi la discographie, je suis allée à tous ses concerts et c’est l’unique artiste avec qui ça à fait ça. “Safari Disco Club” est l’album qui m’a accompagnée toute ma seconde. J’aime sa liberté, comment elle s’est réinventée, j’aime l’ensemble de l’artiste qu’elle est. Par contre ses clips je ne les mettrais jamais en top parce que je ne les trouve pas à mon goût, mais elle est une artiste tellement confirmée, globale, elle a tellement son regard, sa vérité, dans ce qu’elle fait du concept Yelle, et ça me plait beaucoup. Comme Izia, ce sont des artistes que j’aime dans ce qu’elles font et dans ce qu’elles représentent en tant que femmes. Elles font bien sûr partie d’une industrie mais j’ai l’impression que c’est d’abord leur parole qui prône. Elles ont une force de caractère à laquelle je m’identifie et qui m’inspire.”

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Jeanne Lyra, portrait musical, 2022