Echange avec Emkal, un des meilleurs symboles musicaux de la qualité marseillaise

Emkal 2021

Crédits : DR, Emkal à Planète Rap avec Sofiane

Marseille. Qu’en connaît-on vraiment, musicalement ? Jul, SCH, Naps, L’Algérino, Soprano, … Des figures emblématiques, représentatives, plus que conséquentes qui participent considérablement à rappeler, scander et prouver qu’en France, le rap qualitatif ne se fait pas qu’à Paris.

Au vu de leur succès et leur légitimé, leur mérite et leur talent, ces figures ne sont malgré leur empreinte toujours plus forte et leur histoire toujours plus longue, pas les seuls acteurs du rap phocéen. D’autres candidats, d’autres participants, moins mis en avant ou noyés non pas par les marées du Vieux Port, mais par le flot de nouveaux rappeurs, usent de leur flow pour se faire entendre, à leur juste valeur, au delà des limites de Marseille. Connus et reconnus dans le 13, ils ne le sont pas forcément à l’extérieur. Mais plus ça va, mieux le rap se porte, et plus l’horizon musical de la ville s’élargit. Bon nombre de groupes marseillais sont dans la légende comme IAM ou Psy4 de la rime pour ne citer qu’eux.

Aujourd’hui les groupes se font plus discrets, peut-être bien pour mieux en faire briller d’autres. Après tout chacun son temps, chacun son tour. Une nouvelle vague marseillaise (pour rester dans le maritime) est justement en train de déferler sur la France, du sud au nord, conquérant le territoire étape par étape. Une véritable inondation.

Emkal, fait partie de l’écume qui constitue ce nouveau courant, s’approchant peu à peu du devant de la scène. La vingtaine, après plusieurs années de travail et d’acharnement à poster sur les réseaux, Marseille semble enfin lui rendre l’amour qu’il lui porte. Et pas que. Il accumule les nombres de vues sur le Net, met en image les sons qui lui trottent dans la tête.

Emkal, ne se la prend pas, la tête, d’ailleurs. Pour lui la musique c’est instinctif, naturel, c’est le succès qui demande davantage d’efforts. Il me dit d’ailleurs : « J’ai beaucoup travaillé et mis de l’amour dans mes sons et dans mon parcours, je suis content et fier d’en arriver là. » En arriver là, ça veut dire plusieurs millions de vues sur Youtube, plus de cent mille followers sur Instagram, et un gros projet en préparation, ainsi qu’une signature récente en maison de disque.

Attention, Emkal ne s’arrête pas, ne se contente pas de ça. Il « vise très haut » et compte suivre la route qu’il est en train de tracer, mais surtout il veut se créer un carefour de possibilités, qui lui permette de viser toujours plus loin, là où foi, passion, travail, amour et détermination pourront le mener.

Musicalement il fait de tout, mais laisse chacun le placer dans la case qu’il souhaite. Lui-même, en revanche, refuse de se catégoriser. « Je fais ce que j’aime c’est tout » insiste-t-il. Vous pouvez lui accoler n’importe quel style, il ne vous donnera jamais raison de son propre chef, c’est vous qui décidez. Cependant, si une chose est cohérente et reconnaissable, c’est son flow. La manière de prononcer, de dire les mots, de déclamer, de chanter, quelque chose de général et précis à la fois fait que vous reconnaitrez ses morceaux parmi des centaine d’autres. Emkal c’est un univers sonore, une météore. Lointaine, unique, et pourtant si éclectique.

Bonnie & Clyde 1 et 2, Ex, Roi et reine, sont des morceaux qu’il définit – sans les classer – comme street et love. Des romances, qui prennent place et évoluent au sein du quartier et du quotidien de la rue et de la cité. « J’ai commencé la musique en faisant du rap cru, mais les gens préfèrent quand je suis dans le thème street love. » Chose qu’il apprécie également, sans pour autant laisser de côté le rap pur, cru. Sur des morceaux comme Miroir, Marseille (clip ci-dessous), ou encore Yeah, le ton est plus à l’ambiance, à la testostérone. Tout en restant très mélodieux, presque ambiançant, une atmosphère bourrée d’énergie et de vibe, avec des combinaisons parfois hasardeuses qu’Emkal sait tourner à son avantage. Le résultat ? Des chansons originales, véritables, harmonieuses, et encore et toujours, street. Quel beau mélange.

Lorsqu’on en arrive à ses inspirations, le rappeur mentionne notamment Michael Jackson, Tupac et pour les trois suivants, il tient à préciser que ce sont des personnes qui comptent pour lui, dont il a toujours écouté les conseils et la musique, et qui l’ont beaucoup aidés dans son parcours. Je parle ici de Sofiane (mon article sur son dernier album ici) qui lui a donné l’opportunité de faire son premier concert en sa compagnie, à l’Olympia, et qui l’a également invité, plus récemment, sur son Planète Rap à la radio Skyrock, où Emkal a choisi d’interpréter entre autres son morceau inédit, La cité. Le deuxième que le jeune homme tient à citer, c’est Alonzo qui l’a beaucoup partagé sur les réseaux. Enfin, Soolking, qu’il considère comme un frère, lui a donné de la force dès le départ. Trois soutiens, qu’Emkal tient particulièrement à remercier avec sincérité et reconnaissance.

Ca ne s’arrête pas là. C’est bien connu, le monde de la musique et le monde du business musical peuvent parfois être rudes et injustes, voire déloyaux. Il faut faire attention à ce qu’on nous propose et de qui on s’entoure. Tout le monde le sait dans ce milieu. C’est pourtant plus facile à savoir et à dire qu’à faire. C’est pourquoi Emkal ajoute son label Hyperfocal à ceux qu’il remercie. Un label qui a toujours cru en lui et qui l’a accompagné, soutenu, dès le début. Quelque chose que le jeune rappeur n’oublie pas. Ce label c’est son tremplin, son socle, mais c’est aussi sa famille. Un lien précieux qui n’est pas prêt de céder.

Emkal 2021

Crédits : DR

Avant de se faire aider par les plus grands, Emkal a commencé petit, ou du moins à son échelle. Enfant, son grand frère, qui l’épaule toujours actuellement, était rappeur. Il avait son propre studio chez lui, ce qui permettait au jeune Emkal, de se faufiler dans la pièce de création lorsque son ainé partait au travail. C’est de là qu’a grandit son amour pour la musique, et c’est grâce à son frère qu’il a autant apprit, avant de pouvoir se lancer seul.

Ne vous méprenez pas ! Seul ne signifie pas isolé. Toute une équipe, composée principalement de la famille ou de proches du jeune rappeur, participe à la fabrication de sons. Parfois, il arrive qu’Emkal en mette un en forme de A à Z, mais la plupart du temps, son entourage le conseille, voire l’assiste dans la création artistique de sa musique.

Quand Emkal pose un regard sur le rap francophone d’aujourd’hui, dont bien entendu le rap de sa ville, il est joyeux et enthousiaste « Je kiffe nos jobs et comment on s’est implantés dans le rap, nous, les francophones ! » Francophones dont Emkal fait partie. Même francophone, il intègre souvent de l’arabe dans ses textes, à mes yeux davantage que d’autres. Ce qui ajoute en musicalité et apporte nouveauté et fraicheur aux morceaux.

Vous l’aurez compris, je vous recommande chaudement Emkal, qui est un artiste prometteur, qui commence à peine la carrière qui lui est destinée. Pour la suite, soyez au rendez-vous !