Il n’a pas la langue dans sa poche. Que ce soit dans ses textes ou au quotidien. Il a un avis sur les choses, le milieu du rap en France, le business, et il ne s’en cache pas. Il sait où il met les pieds, et un pas après l’autre, il enjambe, il avance, il progresse.
Achim est un rappeur Marseillais du quartier de la Castellane. Ce qu’il fait est très différent du rap qu’on a l’habitude d’entendre à Marseille, quand on n’en connaît que les plus célèbres représentants. Celui d’Achim est plus singulier. Plus personnalisé. Plus marqué, travaillé dans la précision, à tel point qu’on redécouvre ses textes, ses mélodies à chaque écoute. Achim, c’est un rap à texte, sur un ton rongé par la vie. Une voix claire, des mots qui s’assemblent sans efforts et qui restent en mémoire, quitte à leur trouver un sens nouveau plus tard. Le rap n’est pas une thérapie pour lui. Son écriture raconte ce qu’il connaît. Ceux qui l’entourent, sa vie de tous les jours et ce qu’elle lui laisse comme impression, comme goût, parfois amer certes, mais présent, identifiable, et réel. Et c’est parce que l’on a affaire aux aspects de la vie les plus sombres, qu’on sait apprécier le reste, plus fort et avec plus de saveur. Ses paroles peuvent être froides, illustrées de façon décalée, sur des clips agrémentés de quelques touches humoristiques, ni trop, ni trop peu.
Adolescent, Achim se met à rapper, professionnellement. Après plusieurs années de travail acharné, il est contraint, pour diverses raisons, de se consacrer à autre chose. Trois ans plus tard, grâce à un heureux alignement des planètes, Achim revient. Il doit tout réapprendre, mais il est mieux entouré, aiguillé, conseillé, épaulé. Il se sent plus soutenu. Il sait ce qu’il veut, ce qu’il aime, ce qu’il veut faire. C’est sa place. C’est ainsi qu’il repart à la charge en 2020. Année pendant laquelle il commencera le concept des Gamberges et des EPs à une lettre : R, G, P, et les Gamberges du soir volumes 1, 2 et 3 qui plaisent beaucoup à sa communauté. Pour ce qui est de la conception de ses projets, Achim est méticuleux.
« J’essaie tout le temps de m’améliorer, de faire le mieux possible, le plus compréhensible. »
Il m’explique que son univers créatif est loin d’être abouti, et qu’il travaille dur pour offrir plus tard un projet concret, solide et de qualité, autant dans le fond que dans la forme. Son objectif ? Son mode de fonctionnement ? « Ne rien laisser au hasard ». Il considère ce qu’il a sorti jusqu’ici comme des « échantillons » d’une passion qu’il aimerait exprimer et exposer pleinement en sortant un album ou un projet plus conséquent que ce qu’il a pu faire avant. Etant marseillais, il a le mérite de s’être rôdé et frotté au « public le plus dur de France » lorsqu’il écumait les petites scènes de la ville, et enchainait les battles ou les freestyles en plein air, devant une assemblée sévère mais sincère et formatrice.
Achim aime la musique, le rap. Il est passionné. Une passion, qui persiste, qui est toujours présente, sa réussite et sa raison de faire, de vivre de la musique se sont transformées en responsabilité. « Aujourd’hui, le rap est une passion, mais c’est surtout devenu une responsabilité, en réponse à l’amour, au soutien que je reçois des gens qui me suivent, qui croient en moi et en mon futur. »
Ce qui ne l’empêche pas de croire fermement en lui-même ! Sinon à quoi bon ?
Quant au système du rap en France, il trouve dommage que le rap le plus mis en avant de nos jours suive un schéma si codifié, si cliché. Que celui de la rue, de la cité, celui de la violence et de la bédav, soit utilisé au profit d’une tendance, d’un buzz. Ca existe, ça fait partie de la réalité, mais c’est poussé à l’extrême et ça devient récurrent.
« Je suis de la Castellane, un des quartiers les plus chauds de Marseille. J’ai vu ça, je l’ai vécu. Mais je ne vais pas le promouvoir, parce qu’il y a autre chose. On est obligé d’en parler parce que c’est présent. Mais je trouve que la façon que certains – rappeurs – ont de le faire, c’est gênant. »
Attention ! Achim a beau déplorer l’éthique d’un système, il sait que tout n’est pas si vicieux que ça. Il est aussi le premier à dire qu’il ne juge pas et que ses paroles n’engagent que lui. Seulement il voudrait que cette industrie soit un peu plus équilibrée.