Le deux février dernier s’est déroulé le 54e Super Bowl au Hard Rock Stadium à Miami. Ce match qui constitue la finale de la National Football League est un évènement suivi par les citoyens des États-Unis, mais aussi par des téléspectateurs étrangers. Ce match est à la fois sportif et culturel puisque la mi-temps est confiée à un artiste et son équipe et qu’au début du match, l’hymne national est chanté par un interprète. Celui qui chante l’hymne et celui qui fait un live à la mi-temps ne sont jamais les mêmes. Michael Jackson, Prince, Beyoncé ou encore Madonna font partie de la longue liste de ceux qui ont eu la chance d’être choisis pour faire ce live. Une telle performance est un véritable privilège et seules les plus grandes stars de la musique ont l’honneur d’y prendre part.
Cette année c’est Shakira et Jennifer Lopez (JLO) qui ont pu se produire sur cette scène mythique. Les femmes et la communauté latino, très présente aux États-Unis, sont mis en avant cette fois-ci. Shakira qui fêtait d’ailleurs ses 43 ans le jour même du half time est colombienne tandis que JLO est une chanteuse, actrice et danseuse américaine d’origine portoricaine de 50 ans. Toutes les deux sont de véritables colosses des industries musicales latino, américaine et internationale. Parties de rien, elles ont gravi les échelons pour devenir des icônes. Tube après tube chacune se hisse au rang de superstar.
Ce show était spectaculaire. L’audience live n’a pas battu de record bien qu’elle ai été très bonne. La cérémonie postée ensuite sur YouTube explose les compteurs avec plus de 120 millions de vues. En comparaison, le show de Katy Perry en 2015 considéré comme le plus regardé en live, ne dépasse pas les 27 millions de vue en rediffusion sur YouTube.
L’énergie, le dynamisme, la passion, les prises de risques et les chorégraphies audacieuses, tout y était ! Shakira ouvre le bal avec She Wolf, vêtue d’une tenue pailletée rouge qui rappelle l’aspect d’un rubis, tenue multifonctions qui se transformera (légèrement) au fur et à mesure de sa prestation. Elle enchaîne sur Empire et Ojos Asi, sur lesquels elle exécute pour la première fois du live sa fameuse danse du ventre qu’elle emprunte à ses origines libanaises. Ensuite commence Wenever, Wherever qui est coupée au montage après quelques secondes sûrement pour des raisons de droits d’auteur bien que ce soit étrange puisque c’est la seule partie du show qui soit raccourcie au montage. Après cette grande frustration, à la surprise générale, Shakira entame I Like It un des plus gros hits de la rappeuse Cardi B. On comprend quelques instants plus tard que c’est pour mieux pouvoir introduire un des invités masculins de la soirée, qui n’est autre que Bad Bunny, un rappeur à succès portoricain de 25 ans qui fait partie des différents interprètes présents sur I Like It tout comme J Balvin qui fera son apparition peu après.
Bad Bunny apporte sa touche au concert de façon plutôt plaisante. Suite à I Like It le duo continu avec Chantaje qui est officiellement interprété par Shakira et Maluma. Une fois ces deux morceaux terminés, Shakira entame Hips Don’t Lie un de ses meilleurs titres et tout premiers succès. Quelle ne fut pas ma déception quand pile au moment de commencer son refrain, elle se jette dans le public, ce qui l’empêche de chanter et ce qui nous prive encore une fois du plaisir de l’écouter et d’admirer ses talents de danseuse.
Se passe ensuite l’incompréhensible : une fois de retour sur scène, juste avant de se remettre à chanter, la chanteuse se penche vers une caméra, ce qui nous permet de la voir en gros plan nous faire une sorte de bruit de bouche, incongru et très déconcertant mais surtout pas du tout nécessaire.
Le dernier refrain de Hips Don’t Lie termine la partie solo de Shakira.
Vlan ! Changement de décor ! Surgie de nulle part, Jennifer Lopez apparaît, comme sur le haut d’un gratte-ciel, agrippée à une grosse antenne. Il suffit de quelques secondes pour comprendre que cette deuxième partie du show sera d’un autre niveau non pas en terme de chant et de danse mais en terme de mise en scène de costumes, et de chorégraphie.
Tout de Versace vêtue, micro en main, JLO scintille dans un ensemble noir et or accessoirisé d’une longue traine rose qu’elle retire dès qu’elle commence Jenny From The Block. Sous les cris des milliers de spectateurs présents sa performance démarre. Elle rejoint la scène et ses danseurs. Plus de couleurs, plus de danseurs, plus d’inventivité et d’originalité, l’écart avec le show de Shakira qui était bien plus sobre et simple et on ne peut plus visible. En plus de ça, l’ambiance que dégage la mise en scène rappelle fortement les années 2000 et leur côté bling-bling qui concorde parfaitement à l’univers de la JLO. La performance est d’autant plus impressionnante de par l’âge de la chanteuse.
Les chorégraphies sont toutes différentes selon chaque chanson, elles sont beaucoup plus complexes et plus recherchées, plus risquées. Les lumières sont mieux utilisées et les titres s’enchaînent apportant un rythme endiablé au show.
Ain’t It Funny (Murder Remix), Get Right ouvrent le spectacle avec une atmosphère sombre et des danseurs éparpillés sur toute la scène, en utilisant très bien l’ensemble de l’espace qui leur est accordé. Lors des premières notes de Waiting For Tonight on entre dans un cadre complètement différent. Une ambiance de boîte futuriste s’installe il fait presque noir et les seules lumières qui éclairent la scène sont d’un vert fluo qui rappelle celui d’un laser. Perchée sur une barre verticale, Jennifer domine une fois de plus, surplombant une marée humaine de danseurs. Elle a retiré son costume noir pour nous en dévoiler un bien plus révélateur. Seul défaut de ce moment : l’utilisation du sol comme écran, donnant l’illusion d’un ravin profond. Trop cheap et mal fait à mon goût et surtout inutile bien qu’on l’oublie vite et que ce ne soit visible que d’en haut. C’est à ce moment que le deuxième invité fait son apparition : J Balvin, un rappeur colombien, tout aussi connu que Bad Bunny. Un medley en duo commence alors avec Booty, Que Calor, El Anillo, Love Don’t Cost A Thing, Lento et enfin Mi Gente. Je ne le répèterais pas assez, JLO donne tout ce qu’elle a et la performance vaut vraiment le coup. Connue pour ses concerts spectaculaires il est difficile d’être déçu. Au moins une partie des chorégraphies de Jennifer ont été réalisées par Parris Goebel, une jeune chorégraphe que tous les plus grands s’arrachent et qui a travaillé avec Justin Bieber ou Rihanna pour ne citer qu’eux.
JLO reprend sa partie solo avec On The Floor. Pour finir en beauté (du moins c’était son intention), la chanteuse nous présente Let’s Get Loud et Born In The USA en compagnie d’une de ses filles qui a droit à un solo, qui pour ma part ne m’a pas plu du tout. Je comprend mal sa présence et trouve qu’elle n’apporte rien au spectacle. Heureusement Jennifer rattrape vite le tout en se présentant drapée dans un manteau/drapeau réversible, les Etats-Unis d’un côté et de l’autre Porto Rico, ce que j’ai trouvé très astucieux et réussi.
Shakira est de retour pour ce medley. Les deux divas chantent ensuite Waka Waka (This Time For Africa) hymne de la coupe du monde de football de 2010 et tube planétaire interprété à l’initial par Shakira sur une très belle chorégraphie de la jeune femme qui danse seule un moment.
Jennifer Lopez clôture le spectacle avec la meilleure performance de danse de toute la mi-temps. Je ne saurais vous dire le nom exact de cette danse qui doit être de la salsa ou quelque autre danse latino. Les figures se multiplient et pour la toute fin du concert, Shakira et JLO terminent leur performance par un déhanché dévastateur avant de saluer et remercier le public. Les deux femmes se serrent mutuellement dans leurs bras marquant une bonne fois pour toutes la fin du spectacle.
Ce Half Time est mémorable ne serait-ce que pour le duo réuni cette année. L’attente face à ce genre de collaboration et ce genre d’évènement est extrêmement élevée. Je trouve que le défi est largement relevé malgré le manque d’ambition de la partie de Shakira dont j’attendais bien plus. Je trouve étonnant qu’il y ait un tel écart concernant les deux performances. Shakira aurait pu profiter de cette opportunité pour nous faire rêver un peu plus, ce dont elle est tout à fait capable. Elle aurait, je pense, pu faire quelque chose de plus complexe avec une mise en scène plus complète. C’est une danseuse hors pair et sa voix est un vrai bijou. Ce n’a pas assez été mis en valeur selon moi sur cette représentation. Cependant mes critiques n’enlèvent rien à son talent, et le plaisir de la voir de nouveau sur scène est d’autant plus grand du fait qu’elle avait dû arrêter de chanter en 2017 suite à une hémorragie des cordes vocales qui aurait bien pu lui coûter sa voix. Quoi qu’il en soit ce show était tout simplement bluffant et a su nous montrer l’étendue du talent et de la qualité du travail des deux stars.