Lil Peep était un musicien généralement apparenté au rap emo, un dérivé du rap version mélancolique et punk rock, assez délicat à définir. Né aux Etats-Unis en Pennsylvanie en 1996, il constitue de loin un des phénomènes les plus étonnants et tragiques autant en ce qui concerne sa vie, sa carrière et son ampleur, que sa musique. Quand sa notoriété était tout juste grandissante, Peep voulait déjà remplir les stades, conquérir le monde avec son oeuvre et si possible contribuer à le rendre meilleur. Vers 2015 il annonce qu’il est bisexuel, chose rare dans le milieu de la musique et lors d’une période si déterminante pour sa célébrité. Décédé il y a peu à l’âge de 21 ans, Lil Peep aura laissé derrière lui une trace bien visible, un public sous le choc et des proches dévastés mais plus largement, une discographie légendaire.
Everybody’s everything est le titre du documentaire qui lui est consacré. Ce film réalisé par Sebastian Jones et Ramez Silyan est sorti en 2019, il retrace la carrière du jeune rappeur, brève mais intense.
Je vous conseille fortement le documentaire (bande annonce ci-dessous) qui est très bien construit et qui nous apprend beaucoup sur Lil Peep -de son vrai nom Gus Ahr- et son parcours. Le nombre d’archives est impressionnant, Gus filmait ou était filmé constamment, ce qui apporte encore plus d’authenticité au film.
Peep a toujours été attiré par la mode et la musique. Il commence à chanter dans sa chambre alors que ses parents viennent de divorcer vers ses 14 ans. La nuit, il s’isole dans sa chambre transformée en studio improvisé et chante, rappe, crée ses morceaux pendant que sa mère dort. Moqué à l’école à cause de sa personnalité et de sa tendance à absolument vouloir se démarquer des autres, l’adolescence est une période très rude pour Gus. Il en gardera les marques jusqu’à la fin de sa vie.
Plus tard il intègre le groupe punk Schemaposse avec qui il fera ses premiers concerts avant de rejoindre le collectif d’artistes GothBoiClique. Excepté ses voyages de tournée, Gus vit d’abord à Los Angeles puis à Londres, après avoir quitté le domicile familial. Beamerboy fait partie des premiers morceaux qu’il a interprétés avec son groupe initial et qui ont eu un véritable succès auprès du public. Assez rapidement le groupe gagne en notoriété ce qui donne de la visibilité à Peep. Surtout remarqué pour ses productions solo, plusieurs managers le contactent et sa carrière officielle commence lorsqu’il à 18 ou 19 ans. Même quand il était avec son groupe, Gus était écouté de part et d’autre du globe notamment en Russie où ses fans l’attendaient dès sa sortie de l’avion.
Très jeune, Gus exprime sa différence. Tous ses proches ou ceux qui l’ont côtoyé sont d’accord sur un point : il était un véritable prodige. Sa musique et ce qu’elle renvoyait et renvoie toujours étaient si profond et sincère que l’on est instantanément frappé par sa force. Il était la star qui allait révolutionner la musique. Son style, jamais entendu auparavant est inclassable car trop complexe et trop changeant. Un jour punk, un jour pop, un autre rap alternatif, les choses qui persistent dans ses morceaux sont une tristesse et une détresse criantes. Un de ses managers, insiste, rien n’est inventé dans ses textes, tout est vrai, honnête, il chante ce qu’il ressent, pense et imagine et transforme le tout en mélodies déchirantes et puissantes, qui nous laissent pantois ou qui réveillent le côté sombre de chacun. Un peu comme un effet de catharsis.
Voici le morceau RATCHETS en featuring avec Diplo monument de l’industrie musicale actuelle et Lil Tracy, un de ses amis et collaborateurs de longue date.
Ses titres les plus incroyables sont When I Lie, Problems, U Said, The Brightside (vidéo ci-dessous) ou encore 16 Lines. L’ensemble de sa discographie (trois albums, une dizaine d’EP et de nombreux singles) est très variée musicalement mais aussi très marquée, caractéristique de lui-même. Everybody’s Everything est un album posthume sorti en 2019, album qui comprend des collaborations avec le célèbre producteur ILOVEMAKONNEN de qui il était très proche. Nouvelle, planante et entêtante la musique de Lil Peep est unique et est d’autant plus foudroyante de par la brièveté de sa carrière. La mort et son envie de mourir sont souvent évoquées dans ses textes, ce qui peut laisser penser qu’il vivait et chantait comme s’il ne pourrait bientôt jamais plus le faire. Il y a quelque chose de poignant, de touchant dans ses morceaux, une sensation que l’on ne retrouve nulle part ailleurs. C’est selon moi ce qui fait que ses créations ont un effet rassurant et délivrant, presque magique.
Le nom Lil Peep vient du surnom que lui donnait sa mère auquel il a rajouté Lil qui signifie petit « Little » en anglais. Sa mère, ses amis, ses ex, ses managers le décrivent tous comme quelqu’un de gentil, généreux, incapable de dire non aux gens de peur de les blesser. Son extrême douceur lui coûtera. Plus il sort des sons, plus il fait des concerts, plus il s’entoure d’inconnus, les laissent abuser de sa gentillesse et profiter de ce qu’il construit.
Egalement intéressé par la mode, il aura l’occasion peu avant sa mort de prendre part à différentes fashion weeks, d’assister à des défilés, de défiler lui-même et d’être modèle lors de shootings photo (exemple ci-dessous).
Le 15 novembre 2017, Lil Peep meurt d’une overdose de plusieurs drogues, dans son tour bus, en Arizona. Il était en plein dans l’accélération de sa célébrité et multipliait les projets, les concerts, il était aussi invité à divers évènements dont la fashion week de Paris. Il était en plein dans la construction de sa carrière, de sa vie, de son image et de sa musique mais avant tout de son art.
Pour finir je vous laisse sur le suprême Awful Things avec Lil Tracy qui a participé a augmenter considérablement sa popularité, et qui est merveilleusement clipé. Original, obscur et passionné, ce titre et la vidéo qui l’accompagnent sont un aperçu très représentatif de Lil Peep.
Révolutionnaire et artiste majeur à qui était promis bien plus que ce qu’il a pu vivre, sa musique marquait, marque et marquera nombreux d’entre nous. Le plus bel hommage que nous pouvons lui offrir est d’écouter ce qu’il a fait et croyez moi, ça vaut le détour !